Il suffit de passer le pont

Il suffit de passer le pont


17/09/2010
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De la campagne de Valras à Fornells

De la campagne de Valras à Fornells


17/09/2010
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A la sauce Mahonaise

À la sauce Mahonaise (entubés) …

 

 

… « C’est tout de suite l’aventure … » Il ne croyait pas si bien dire l’ami Georges … Ce vendredi 13 août 2010 (on aurait dû se méfier …) nous entrons dans la rade de Mahon, pas encore très bien fixés sur nos intentions. Guillaume, Valérie et Noé repartent avec le ferry dimanche matin, et avec ce coup de vent de nord-est, on hésite à descendre sur la côte sud de Minorque de peur d’avoir du mal à remonter. Mais peut-être y a-t-il des bus ? Bref, on décide de pousser jusqu’au port, voir les horaires de bus, les tarifs des places, etc. On traverse d’abord la zone de mouillage de Cala Taulera, beaucoup de bateaux, serrés, chaîne tendue, pas évident de laisser le bateau sans surveillance, sans personne à bord. On poursuit la route à travers le Canal de Alfonso XII, puis longeons l’Isla del Rey par le nord. C’est là que nous apercevons un gros ferry en train de sortir du port, impression de voir passer un immeuble entre les rives du chenal. Nous bifurquons sur tribord, il klaxonne, nous serrons encore plus sur tribord et accélérons pour lui laisser la place. A ce moment là, nous ne savons pas encore s’il compte passer au sud ou au nord de l’Isla del Rey. L’option sud nous semble la plus logique car le passage est plus large et plus profond. Nous redressons ensuite la barre pour éviter de heurter les pontons d’aquaculture situés entre la Cala de San Antonio et la Cala Rata, que nous serrons au plus près, et croisons alors le ferry, sur une trajectoire parallèle à une distance estimée de 30 à 40 m sur notre bâbord. Après le croisement, nous voyons la pilotine, qui suivait le ferry, faire demi-tour et sembler venir relever le nom du bateau. Mais sans plus, et on oublie ce petit (non)incident.

 

Nous continuons dans le port et nous apercevons Misaotra, le bateau des amis avec Marco et Guilhaine à bord, amarré à un quai, et nous décidons de les rejoindre. C’est le quai des pêcheurs, seul « quai d’accueil » de Mahon où l’arrêt n’est toléré qu’une heure ou deux … et tant que les pêcheurs ne sont pas revenus. Aussitôt amarrés, une voiture de la police portuaire s'arrête et des flics en uniforme descendent et relèvent le nom du bateau en griffonnant sur un carnet. Je vais leur demander ce qui se passe. Ils nous demandent les papiers du bateau, et nous arrivons à comprendre dans leur espagnol rapide que le pilote du ferry a porté plainte contre nous pour avoir coupé sa route. Nous sommes convoqués l'après-midi à la capitainerie. Ça y est, on est bons pour une prune … J’y vais avec Valérie alors que les bateaux sont expulsés du quai des pêcheurs pour laisser accoster les chalutiers qui rentrent. A la capitainerie, « el instructor » (qui heureusement parle anglais) nous apprend la mauvaise nouvelle : le pilote du ferry a porté plainte contre nous, le procès aura lieu d’ici un an. Comme nous sommes étrangers, les papiers du bateau sont confisqués, le bateau assigné au port de Mahon, et on ne pourra repartir qu’après avoir versé une sorte de caution, ou plutôt de garantie, dont le montant pourra être revu à la hausse ou à la baisse suivant le résultat du procès. « Combien la caution ? » demandai-je. « On se sait pas encore, 1000, 2000, 3000 … ou 12000 € » qu’il me répond. Gloups !!! Il attend un fax de Palma qui doit fixer le montant de cette foutue caution. Et Sahaya qui fait des ronds dans l’eau devant les fenêtres de la capitainerie … Le fax crache sa sentence : 3000 € ! Alors qu’il ne s’est rien passé ! Le motif : « infraction grave à la sécurité maritime et mise en danger des deux bateaux ». Franchement, y’aurait presque de quoi rigoler, le Martin i Soler, 162 m de long, fleuron de la flotte de Balearia, mis à mal par un voilier de 13 m à 3 nœuds. Petit mais costaud ! Bon, en attendant, ça ne nous fait pas rire du tout. C’est la grosse tuile. Je tique tout de suite sur le rapport du pilote, sur la distance à laquelle on serait passé devant la proue du ferry (30/40 m pour le capitaine, 40/50 m pour le pilote, pas possible ! On n’est jamais passé si près devant cet immeuble !), et sur le fait qu’on n’aurait pas répondu à ses avertissements. Si, on a accéléré la manœuvre de dégagement.

Ça se complique, car il faut que Philippe vienne en personne signer la déposition en tant que propriétaire du bateau. Valérie l’appelle. Il cherche alors une place pour mouiller, pas évident, beaucoup de fond et beaucoup de vent. Le temps de gonfler l'annexe, d'y installer le moteur, de parcourir les 3 miles, et de trouver un petit coin pas interdit pour amarrer l’annexe, il nous rejoint à la capitainerie. Il est complètement effondré … Nous avons 15 jours pour déposer un document (en espagnol) pour notre défense si nous voulons.

Les flics portuaires nous emmènent en voiture voir notre « place » : au fin fond du port de Mahon, derrière les ferrys, au « muelle del urgencia » des flics. Nous retournons tous les trois en annexe chercher Sahaya, et l’emmener dans sa « prison » …

 

Sahaya en prison au fond du port de Mahon

 

Prison dans laquelle il restera finalement 15 jours … Allez, on vous passe les détails de ces deux semaines dans la chaleur moite de Mahon, terribles pour notre moral, à osciller entre colère, rage, espoir et découragement. On envisagera même de partir en loucedé, de nuit, mais sans les papiers du bateau c’était risqué, et on ne connaît pas les moyens de la police (apparemment, ce sont de gros moyens !). Les journées s’écoulent, au début au téléphone pour chercher de l’aide auprès des consulats (« si c’est une affaire de justice, on ne peut rien pour vous, et si vous êtes en infraction, c’est que vous avez tort »), et de nos assurances (« Protection juridique » qu’ils disaient. Parlons-en ! Comme il n’y a pas eu d’accident, ils ne sont pas concernés, et ne consentiront même pas à un simple conseil juridique par téléphone). Dans les Cyber Cafés, ou assis sur un muret d’où on a repéré un accès Wifi gratuit, à chercher des conseils tous azimuts sur les forums et les sites de voyageurs, envoyer et répondre à des mails. A passer et repasser à la capitainerie, dans les administrations, à la banque. A tenter de rencontrer le pilote au moins pour voir à qui l'on a affaire et essayer de s'expliquer avec lui, mais il se débinera et ne répondra pas au message que je lui laisse. Nous passerons aussi du temps avec l’ex-consule de Minorque, qui nous aidera beaucoup dans les démarches.

Nous en apprendrons de belles sur les us et coutumes du port de Mahon, dont la réputation ne serait plus à faire : pilote imbécile, ivrogne notoire, caractériel et francophobe, mais néanmoins patron du port, main mise du privé pour faire le plus de fric possible (même pas de ponton d'accueil, tout est payant, pour un 13 m c’est de l’ordre de 130 € la nuit !), administration incompétente, etc.

Au ponton en fond de port, on fait la connaissance d’un skipper espagnol qui skippe un grand catamaran pour un couple de Français. Et bizarrement, il lui est arrivé très récemment presque la même histoire que nous : en entrant avec le cata dans le port de Mahon, il a croisé un ferry qui en sortait, et le pilote lui aurait fait un « cirque » pas possible, de grands gestes, sur-jouant un risque de collision qui n’existait pas. Et le skipper a lui aussi été mis à l’amende, il attendait le verdict (bien décidé à ne pas payer), mais en tant qu’Espagnol, il n’avait pas de caution à verser. Alors quoi ? Pilote problématique mais néanmoins couvert par sa hiérarchie ? Et/ou racket organisé ?

 

Heureusement, les amis et la famille nous soutiennent moralement, par téléphone, par mail, par la pensée. Rémi lance un forum pour nous aider sur Sail The World. Les parents de Philippe et sa sœur, Claudine, sont sur le pied de guerre à Balaruc. Le papa est mis à contribution pour la traduction de notre rapport de mer en espagnol. Claudine contacte des amis avocats londoniens, et par leur intermédiaire, nous sommes mis en relation avec un avocat maritime de Madrid qui, par amitié, s’occupe de notre cas pendant ses vacances ! Nous échangerons des mails, donnerons des infos « in » et « off », des cartes de notre trajectoire enregistrée par GPS. Le carré est transformé en bureau de la défense, on a tout sorti ! Ordi, scanner, imprimante, dictionnaires.

 

 

Pour notre défense, l’avocat ajoutera à notre propre rapport de mer une plaidoirie de près de 30 pages qui en reprend les éléments en les développant avec métier : que les ferrys pourraient passer au sud où ils ont plus de place, ou bien faire passer un bateau devant pour dégager la piste, qu’on n’était pas en risque de collision puisque le pilote n’a pas jugé nécessaire de manœuvrer, qu’on avait réagi aux avertissements, qu’on était de bonne foi et de bonne volonté, etc. Il ne nous reste plus qu’à attendre le résultat du procès.

 

Allez, la touche finale : nous payons la caution de 3000 € le vendredi 27 août au matin, auprès d’un autre gars de la capitainerie qui parle un peu français, et nous dit que ce principe de faire payer des cautions aussi faramineuses aux étrangers, quelle que soit l’infraction supposée, et quel que soit le bateau, le scandalise. « L’Espagne est folle. Ce sont les touristes français et italiens qui payent ses problèmes financiers ». Il nous souhaite bon voyage. En fin de matinée, nous avons la visite de deux flics portuaires venus nous faire signer la levée de la rétention du bateau, et nous disent que nous pouvons partir « quand nous voulons ». On demande s’il est possible de ne partir que dimanche matin, pour finir de se préparer et laisser passer un nouveau coup de vent de nord-est. Ils vont demander à leur chef et reviennent dans l’après-midi. L’après-midi passe, mais pas eux, on se dit que ce doit être ok. Erreur … Samedi matin, un petit flic teigneux déboule et nous demande de dégager. On a 5 minutes. On essaye d’argumenter, le ton monte, mélange d’espagnol, de français et d’anglais. Heureusement que notre panoplie de gros-mots espagnols n’est pas très étoffée sinon on aggravait notre cas … Il repart … et revient flanqué de deux collègues, dont l’un parle un peu français. Ah non, il faut vraiment qu’on s’en aille très vite, on en peut pas rester là, c’est le quai de l’urgencia des flics. Maintenant qu’on a payé la caution, il devient surtout urgent qu’on dégage.

Alors on part, en vrac, les vélos encore sur le pont, écœurés, et la rage au ventre.


02/10/2010
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Flottement

Flottement …

 

 

Comment dire les doutes qui nous assaillent depuis Mahon ? Cet épisode nous a flanqué un sacré coup au moral. Pire, il casse l’élan du voyage, qu’on espérait trouver une fois partis sur l’eau après ces longs mois de préparation.

Vite au bord du découragement, nous avons du mal à relativiser, tout nous paraît hostile, chaque événement, même de peu d’importance, crée une résonnance démesurée : un mouillage rouleur, une nuit de mauvais sommeil, un vent contraire, une houle teigneuse, une gardienne de bouées bouledogue qui nous éjecte en aboyant (sur une menace de 6000 € d’amende, de mieux en mieux !), et voilà l’essence même du voyage remise en question ! A quoi bon continuer « si le monde est si méchant » ? On cherche des interprétations : est-ce une succession de signes qui nous inciteraient à arrêter ce voyage ? Ou bien une série de tests, un « parcours initiatique » pour mesurer la solidité de notre motivation ? Rémi nous livre une pensée de Bouddha « ce n’est pas parce que le chemin est semé d’embûches que ce n’est pas le bon chemin ». Oui mais … comment savoir si l’on est sur le bon chemin ?

 

Bref, nous vivons une longue période de flottement …

 

Il faut dire aussi que les moments de répit paraissent de courte durée : après la tête dans le guidon dans les préparatifs du bateau, l’épisode de Mahon qui nous a mis la tête sous l’eau, le bateau semble ne rien nous épargner et nous avons souvent la tête soit dans les moteurs (moteur hors-bord de l’annexe, suivi de près par celui du bateau qui a nécessité une grosse journée de boulot, menuiserie, plomberie, etc.), soit dans les réservoirs (réservoir d’eau qui fuit et qu'on a du mal à réparer), soit dans les fonds pour des épongeages chroniques : une fois de l'eau douce (le réservoir bâbord trop rempli et l'eau a débordé par la mise à l'air), une fois de l'eau salée (une vanne que j’avais mal fermée à la gite et l'eau de mer a débordé par les toilettes), et dernièrement de l'huile moteur (le groupe électrogène rangé sous un plancher qui a décidé de faire sa vidange tout seul comme un grand par le bouchon de remplissage ...).

 

On a compris qu’en bateau, rien ne doit être laissé au hasard.

Et que même comme ça, y’a pas mal de problèmes.

Mais que ça vaut peut-être le coup quand même.

Alors … qu’est-ce qu’on fait ?


02/10/2010
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"Un jour ..."

Un jour

 

Un jour prendre la mer

Comme on prendrait la fuite

Infidèle à la terre

Pour filer l’insolite

 

Un jour être au départ

D’une belle aventure

Maritime, Haut l’espoir !

En proue, jolie figure

 

Avoir pour tout bagage

Son cœur ouvert en grand

Bohême, curieux, volage

A tout cœur, à tout vent

 

Un jour prendre du champ

Mener sa solitude

Remonter les courants

Sous d’autres latitudes

 

Aller quérir ailleurs

Tout c’qu’on avait déjà

Qu’au fil des banales heures

On ne voit plus ou pas

 

Partir ô oui partir

A l’appel de la mer

Pour mieux revenir ?

Oui, mais c’est nécessaire

 

De se mener en bateau

Mêler colère, répits

Sur ses monts et ses vaux

Ses vagues à l’âme unies

 

Pour revenir un jour

Comme la vague, apaisée

Faire patte de velours

Sur sa vie retrouvée

 

Car voilà qu’au retour

L’aura du voyageur

Du fil repris des jours

A changé les couleurs

 

 

Nathalie (quelques années avant le départ ...)


09/10/2010
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Avancer

On avance …

 

 

On avance … L’idée est de rejoindre au moins Madère et les Canaries, tâter un peu d’Atlantique, et de prendre une décision pour la suite.

 

Après deux mouillages à Majorque, et une jolie balade jusqu’à la Trappa, un ancien monastère trappiste en cours de restauration avec une vue imprenable sur l’île de Dragonera, nous traversons vers Ibiza où Raymond, du chantier France Play Boat de Balaruc-les-Bains, en vacances là-bas sur son bateau, nous attend depuis quelques jours à San Antonio Abad. Cette visite nous fait chaud au cœur : enfin quelqu’un content de nous voir !!

 

 

Balade à La Trappa, depuis le mouillage de San Telmo, près de Dragonera

 

Le lendemain, le 2 septembre, nous faisons route ensemble et mouillons de conserve à Espalmador, près de Formentera. Raymond repart vers Sète le dimanche, et nous faisons quelques miles pour rejoindre le mouillage de Calo de s’Oli, près de La Savina. Nous allons y passer trois jours, sur corps-mort gratuit. Footing sur les chemins de bord de côte, balade à vélo (à défaut du scooter que nous devions louer, mais j’avais oublié les permis au bateau !...) jusqu’au Cabo Berberia, pointe sud-ouest de Formentera, sauvage et sèche, plantée d’un phare aux allures de bout du monde, menus bricolages : cette escale nous requinque !

 

Petits garages à bateaux près du mouillage de Calo de s'Oli

 

Ciel de feu au mouillage

 

Un coup de vent de sud-ouest viendra perturber une nuit au mouillage. Philippe double les amarres sur le corps-mort qui a l’air solide. Un bateau à l’ancre dérape. Par chance les gens se réveillent et réagissent avant d’arriver sur les rochers. Un autre zigzaguera au moteur un bon moment entre les bateaux, promenant les échos des engueulades entre barreur et homme de proue dans tout le mouillage. Bref, une nuit bien peu reposante …

 

Footing sur la côte ouest de Formentera

 

 

 En revenant du Cabo Berberia

 

Après cette escale à Formentera, on profite d’un créneau de vent pour rejoindre le continent espagnol, en visant le sud du Cabo de la Nao. C’est une belle navigation, le vent attendu est au rendez-vous, et nous filons au travers puis grand largue avec une houle qui nous pousse.

 

 

 

Une inquiétude viendra ternir cette fin de journée, quand nous voudrons démarrer le moteur avec la chute du vent : il est bien poussif ? Le soir, au mouillage de Punta de Moraya, petite vérification du niveau d’huile : et catastrophe une sorte de mayonnaise grise apparait sur la jauge ! Ah non, y’en a marre des histoires de mayonnaise !! On imagine tout de suite le pire : joint de culasse, moteur à sortir, un mois coincés en marina !! Philippe se plonge dans les docs techniques, les forums de voyageurs, appelle Johnson de Marine Diesel, et, en cogitant un peu, revoit les prévisions pessimistes à la baisse : ce serait finalement le waterlock mal placé qui a laissé, à la gite sur bâbord, rentrer de l’eau de mer par l’échappement jusque dans le moteur. Et le moteur n’aime pas ça, mais alors pas du tout ! Heureusement, il a l’air d’avoir supporté l’expérience, et nous lui offrons une bonne bolée d’huile toute neuve, mais il nous faut remédier au problème sans tarder et faire une escale technique en marina.

 

Le lendemain, petite route jusqu’au mouillage de Calpe, au pied du Monte Ifach, que l’on gravit et redescend en express, en faisant la course avec la nuit !

 

 

Du haut du Penon de Ifach

 

Le lendemain, cap au sud toujours. En chemin, nous faisons une petite pause à l’île de Tabarca, mais il y a trop de houle pour rester au mouillage la nuit, et nous poussons jusqu’à la Marina de las Dunas que nous choisissons pour son tarif bien moins cher que celui des autres ports que nous avions appelés et qui se révélera très tranquille et bien sympathique.

Nous y ferons escale trois nuits, pour changer le fameux waterlock de place, ce qui nécessitera deux bonnes journées de boulot : vider tout l’arrière du bateau pour déplacer le tuyau d’échappement, menuiserie pour faire une nouvelle place au waterlock dans un coffre, plomberie, etc. Espérons que cette fois ce soit bon … Une fois le travail terminé nous nous offrons une jolie balade dans la forêt de palmiers d’eucalyptus et d’agaves qui jouxte la marina.

 

P'tit dèj' dans le cockpit encombré

 

 

 Bon alors, qu'est-ce qu'il a ce waterlock ??

 

Le sud nous appelle toujours, et avant le Cabo de Palos, nous faisons escale dans la Mar Menor, sorte de grand étang salé d’un peu plus de 20 km de long, dont l’entrée est barrée par un pont ouvrant à heures fixes. Un petit goût de Sète et d’étang de Thau …

Nous faisons un mouillage tranquille près de l’Isla de Perdiguera, île volcanique avec quelques vestiges du temps où elle était très (trop) prisée : des restes de murs de restaurants, des tunnels, … et une végétation courte et hérissée de piquants.

 

La guitare démange même en mer

 

 

Entrée dans la Mar Menor

 

Mouillage près de l’Isla de Perdiguera

 

Après le Cabo de Palos, la route s’oriente vers l’ouest, en longeant le golfe de Cartagena. Sur bâbord, d’immenses fermes marines, sur tribord, des hectares de serres, marée blanche partie à l’assaut des terres et que seules les montagnes semblent arrêter. Substrat marin, substrat terrestre, et subterfuges technologiques qui donnent une illusion d’abondance. Faut que ça produise !

 

Escale de deux jours à Mazarron, dans la marina bien sympa et pas trop chère également, pour attendre le vent d’est. Balades en ville, le long de la plage, avec la visite de la reconstitution d’une barque phénicienne qui a été trouvée tout près de la plage. L’office de tourisme propose aussi une balade jusqu’au Morro Blanco, sommet de la Sierra de las Moreras. Nous partons avec les VTT le matin, … et revenons très vite au bateau bien rincés sous une belle averse d’orage avant même d’être sortis de la ville ! Deuxième tentative l’après-midi, à zigzaguer entre deux orages, nous finissons par le risquer quand même. Le chemin qu’on suit se perd un moment, enseveli sous un remblai de serre. Vélos sous le bras, on escalade cette décharge particulière : plastiques, vieilles caisses, plants de tomates épuisés, boîtes vides de « bourdons pollinisateurs » (la part de nature nécessaire qui n’a hélas pas encore pu être remplacée par la technologie !), avant de récupérer le chemin plus loin. On ira à pied jusqu’au col, dans les ronces, doit pas être fait souvent ce chemin, pourtant il est balisé de cairns. Du col, les serres étendent leur tapis blanc, des « névés » dans la plaine …

 

 

Balade depuis Mazarron

 

Nous quittons Mazarron, cap au sud-ouest, pour faire un mouillage à Aguilas. Vue de haut, la ville a des airs de ville « du sud du sud » : maisons blanches, toits en terrasses, des bougainvillées tendus au-dessus des petites rues en pente montant vers le château. Quelques coulisseaux remplacés pour la grand’voile, nous nous préparons pour la grande étape du lendemain : 80 miles le long des côtes andalouses jusqu’à Almerimar, au-delà du Cabo de Gata et du golfe d’Almeria. Nous levons l’ancre de nuit, vers une heure du matin. Et nous sommes déjà le 19 septembre 2010…

 

Congrès de mouettes ...

 

Aguilas : ville et mouillage vus de la montée au château


15/10/2010
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Prendre de la hauteur

Prendre de la hauteur

 

Départ d’Aguilas le 19 septembre 2010 au très petit matin. Philippe prend le premier quart, de 1 heure à 4 heures, au moteur surtout, mais du vent de nord-est est annoncé, viendra-t-il ? Il vient, quand je prends mon quart, de 4 à 7 heures. Quelle belle navigation, sous un ciel clair et tout pétillant d’étoiles, avec le bateau qui file au travers, puis grand largue, dessinant des volutes de plancton fluorescent dans son sillage … Instants magiques où l’esprit vagabonde …

 

Nous passons le fameux Cabo de Gata, « Cap Creous » local, à la géologie torturée, au vent arrière. Dommage que nous n’ayons pas le temps de nous y arrêter. La houle nous pousse aux fesses d’une main qui reste légère, et Sahaya se tortille un peu mais reste à plat, les voiles en ciseaux.

 

 

Poisson volant, Radio Alger à la VHF, ça sent le sud !

Le Cabo de Gata marque l’entrée dans le golfe d’Almeria, que nous traversons en tirant droit au large. Les serres mangent le paysage pour inonder ensuite toute l’Europe avec leurs productions gonflées d’eau. Le documentaire « We feed the world », et le bouquin « La noria » en parlent. Noria d’eau, de travailleurs immigrés, de camions … C’est le début de l’Andalousie, et derrière le blanc des serres se découpent les silhouettes de montagnes arides. Qui nous font bien envie !

 

On arrive au port d’Almerimar en fin d’après-midi, et la première impression est plutôt bonne : enfin des bateaux qui ressemblent un peu plus au nôtre ! Il faut dire qu’il y a de tout, en face de nous, une sorte de coffre-fort surmonté de ce qui aurait pu être une cabine téléphonique en guise de porte d’entrée. Plus de voiliers que de bateaux à moteur, de petits et de grands voiliers, certains équipés comme de grands voyageurs. Le port n’est pas trop cher (22 € par nuit, mais on arrive 15 jours trop tôt ! la « basse saison » commence au 1er octobre, et là le prix tombe à un peu plus de 9€), les toilettes un peu rustiques mais propres, on pose les valises pour quelques jours.

 

Le lendemain, nous faisons la connaissance de Maria et Juan, un couple d’Argentins qui vivent sur leur bateau à Almérimar, avec lesquels nous avons été mis en relation par Michel, un ami commun, qu’ils ont connu en Guyane et nous à Balaruc-les-Bains. Par la même occasion, nous faisons la connaissance de leur amie Josianne, une bretonne en visite chez eux. C’est bien sympathique de les rencontrer, ils sont chaleureux, et nous sommes un peu en manque de relationnel. Ils nous raconteront leur expérience de vie de voyageurs, partis qu’ils sont de Buenos Aires depuis de longues années, et ayant fait escale au Brésil, en Guyane, aux Etats-Unis, et maintenant en Espagne. Nous irons manger des tapas avec eux. La tradition andalouse je crois, veut que le verre de vin ou de bière soit servi accompagné de tapas. Ils nous font connaître un bar sympa sur la plage ouest qui en sert de bons et copieux, l’adresse est connue des locaux aussi. Un soir, la table d’à côté est occupée de femmes espagnoles en goguette. Où sont les hommes ? Devant le match de foot évidemment, au fond du bar !

 

Après deux jours de pluie et de bricolage sur le bateau, et une journée de courses à El Ejido (avec ses affiches publicitaires très ciblées : « concombre F1 », « aubergine extra mahousse », « poivron bête de concours », « ton problème : les taches, la raison : le ver, la solution : le produit !! »), il est temps d’aller voir dehors si on y est ! Nous prenons un bus jusqu’à Celin, point de départ d’une grande balade à pied jusqu’à la Fuente Alta, dans la Sierra de Gador.

 

 

Montée agréable, en partie sous l’ombre de pins, avant d’arrivée à la fontaine, qui sert aussi d’abreuvoir à guêpes ! Petit pique-nique devant la vue qui s’ouvre au sud jusqu’à la mer … et les hectares de serres toujours, c’est encore plus impressionnant vu de haut. El Ejido semble enserré dans des marais.

 

El Ejido au milieu des "marais"

 

Au début de la descente, nous rencontrons un berger, chaussé de sandales « caseras ». Il dort en chien de fusil sous un arbre au bord du chemin, son grand troupeau de chèvres éparpillé autour de lui sur les coteaux. Nous le réveillons en passant à côté de lui, il nous interpelle, demande où nous allons. On lui montre sur la carte, « A la Fuente de la Mosca », « Si ». Il se lance alors dans des explications sur les chemins à prendre et ceux à ne surtout pas prendre en dessinant des croquis dans la poussière avec le bout de son bâton.

 

Une rencontre en chemin

 

Il parle en patois, ou en espagnol mais alors avec un très fort accent, en tous cas on n’accroche que quelques mots de temps en temps … Mais il a l’air gentil et d’avoir envie de parler. Quel contraste entre cette vie qui paraît rustre près de la nature et la production « in vitro » en bas ! Retour par le dernier bus que nous attrapons de justesse, bien repus de marche quand même, 25 km et 1200 m de dénivelée, ça vous fatigue un marin (et une marinette aussi).

 

Finalement, d’être allés dans la Sierra de Gador, la Sierra Nevada sa voisine ne nous a pas semblé si inaccessible qu’elle y paraissait … Et si on en profitait pour y aller ?? Le lendemain, nous louons une petite voiture pour quatre jours. Nous allons d’abord faire un après-midi d’escalade à proximité d’Almerimar, sur un petit site juste à côté de Celin.

 

Le petit site d'escalade près de Celin

 

Quelques courtes voies pour se remettre en jambes (et en bras) … avant d’aller tenter plus sérieux le lendemain, sur le site de Los Cahorros à Monachil, quelques kilomètres à l’est de Granada. C’est un grand site de grimpe avec plusieurs secteurs plus ou moins encaissés qui s’égrènent en rives droite et gauche d’un petit cours d’eau. Nous n’avons pas de topo, mais coup de chance, en demandant des renseignements à deux grimpeurs qui montent, nous tombons sur un Français. Il nous donne quelques conseils sur les secteurs où nous pourrons trouver des voies de notre niveau. Nous en ferons quelques unes dans la journée, ça fait du bien de retrouver le contact avec le rocher, mais quand même, les 5c et 6a sont bien tapés …

 

Dans un 6a bien tapé à Monachil

 

Après la grimpe, nous visitons un peu. Nous sommes dimanche, et il y a pas mal de randonneurs. Il faut dire que le coin est plutôt sympa : un pont suspendu à la Indiana Jones, un sentier étroit qui longe le ruisseau avec des mains courantes et des échelons pour passer les renflements de rochers sans tomber à l’eau, ou qui oblige à passer à quatre pattes par endroits (surtout quand on se balade avec de gros sacs pleins de matos d’escalade …). Un seul regret : de ne n’avoir pas eu le temps de visiter Granada, juste un petit arrêt panoramique sur la ville depuis la route qui monte à l’Alhambra. Une autre fois peut-être ?…

 

 

Philippe sur les sentiers de Los Cahorros, à Monachil

 

Lundi 27 septembre, nous nous levons de bonne heure : notre mission puisque nous l’avons acceptée, est de grimper tout en haut du Mulhacen, sommet de la Sierra Nevada et aussi de l’Espagne Ibérique, avec ses 3482 m. La petite Fiat Panda est bien remplie car nous avons embarqué les VTT, pour faire le sommet en vélo. A priori, une piste grimpe jusqu’en haut, il suffirait donc de faire de même … Au départ, nos ambitions étaient d’attaquer la piste depuis Capileira, ce qui aurait fait 53 km et quelques 2000 m de dénivelée. Finalement, nous continuerons en voiture jusqu’à Hoya de Portillo, gagnant ainsi 11 km et 500 m de dénivelée … ce qui ne sera pas plus mal. On se prépare, et on attaque, dans le matin frisquet à 2000 m.

 

Préparation dans le matin frisquet

 

 

Dans la montée vers le Mulhacen

 

La piste est bien carrossable, et zigzague entre les pins, puis la vue se dégage des deux côtés, et le sommet du Mulhacen apparaît, comme le dos rond de gros animal, accrochant quelques nuages. Nous loupons la bifurcation qui mène à la piste qu’il aurait fallu suivre pour aller jusqu’au sommet en vélo, ce qui fait qu’au col, il nous faut laisser nos montures et finir les 400 derniers mètres de dénivelé à pied. Mais c’est chouette quand même ! Le sommet est cosmopolite : des Anglais, des Allemands, des Français. Et hétéroclite aussi : sous la croix sommitale, un bric-à-brac de souvenirs divers : foulards, vieilles chaussures, porte-clés, drapeaux tibétains, et même une cravate !

 

Dernière montée à pied depuis le col

 

Nous y voilà !

 

On trouve de tout ...

 

Nous sommes à près de 3500 m, mais contrairement à l’Aneto qui porte un petit glacier à cette hauteur, le Mulhacen est sec. Un petit air de Ladakh …

Que ça fait du bien d’être là, en montagne ! Ça me remet la tête à l’endroit, me redonne confiance dans le voyage et optimisme pour la vie en général. A la descente, nous apprécions d’autant plus le vélo, allez hop d’une traite quasiment jusqu’à la voiture ! On a quand même mis veste, bonnet, et gants qui ne sont pas de trop en traversant le brouillard.

 

 

Descente vers le brouillard

 

En descendant de la montagne, nous ferons une petite halte « bière fraiche tapas » à Pampaneira, un village andalou typique, tout de blanc vêtu. Les couleurs vives des tapis, artisanat de la région, exposés dans les rues, ressortent d’autant plus.

 

 

Dans les rues de Pampaneira

 

Une balade à Almeria le lendemain, une soirée d’au-revoir autour de tapas avec Maria, Juan et Josianne, et nous partons au mouillage au pied du Castillo de Guardia Vieja à l’extrémité ouest de la baie d’Almerimar pour décoller le lendemain matin avec le vent d’est annoncé, direction Gibraltar.

Nous sommes déjà le 29 septembre 2010, et les journées d’automne raccourcissent à vue d’œil …


22/10/2010
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A la porte !

A la porte ! (de l’Atlantique)

 

 

30 septembre 2010, Sahaya pointe vers l’ouest, vers Gibraltar, vers la sortie ! En fait de vent d’est … nous aurons trois jours de pétole, trois jours de navigation au moteur, égayés de petits incidents quotidiens : une fois le guindeau qui fait grève (les charbons), une fois le moteur qui chauffe (tiens, il manque du liquide de refroidissement, où est-il passé ??), et une fois le vérin de barre qui se désolidarise du safran (revissé). Trois sauts de puce pour faire la route jusqu’à Gibraltar, avec deux mouillages intermédiaires bien tranquilles : le premier sur la petite plage juste à côté de la Marina del Este, et le deuxième à Fuengirola, après Malaga. Nous ferons les deux derniers jours dans le brouillard, un beau brouillard, bien dense, bien épais, merci le radar ! Est-ce qu’on va arriver au bout du monde, cauchemar des marins, au bord d’un précipice sans fond où s’engouffrent les eaux dans une terrible cataracte ? Hé non, le brouillard se lève, le soleil perce, et on aperçoit … la ville de Malaga qui émerge du fond de son golfe. C’est presque décevant …

 

 

Avant Gibraltar, le brouillard se lève et le fameux rocher se dessine. . Il y a de nombreux cargos au mouillage. Nous faisons l’arrivée à la Punta de Europa dans une mer toute désorganisée, avec le vent d’ouest qui s’est levé, et qui retrousse les vagues portées par le courant heureusement pour nous favorable de la marée descendante. Même avec le vent dans le nez, on avance comme sur un tapis roulant. Ça y est, on l’a contourné ce caillou historique, pour entrer dans la baie d’Algesiras qui laisse une impression étrange, avec des cargos au mouillage, accrochés aux mamelles avec leur petite « nourrice » de carburant, et des torchères de raffinerie en fond de baie. Pour le premier soir, nous allons au mouillage de La Linea de la Concepcion, juste à côté de Gibraltar.

 

 

 

Bagarre du vent et du courant

 

Nous prévoyons de rester deux jours à Gibraltar, le temps de visiter. Pour être plus tranquilles avec le coup de vent d’ouest annoncé, nous allons dans la marina toute proche et toute neuve et presque vide de La Alcaidesa.

 

La première balade à Gibraltar amène plein de nouveautés : d’abord le passage de la douane, la première cabine téléphonique rouge « So British », la traversée de la piste de l’aéroport pour arriver à Gibraltar même. Et bien sûr il y a les singes de Barbarie : des petits qui chahutent comme des gosses sous le regard placide des adultes, des bébés accrochés au sein de leur mère, des séances d’épouillage en famille. En ville, c’est un curieux mélange d’éléments disparates : des immeubles typés HLM en entrant, d’autres de plus grand standing, des vestiges de constructions militaires d’époques diverses. Nous montons à pied jusqu’à la crête, puis redescendons par un chemin sur le versant sud pour rejoindre la Punta de Europa. Puis retour au bateau, une belle trotte … Le lendemain, nous tentons de faire le sommet, mais il n’est en fait pas accessible. Terrain barricadé. La vue est belle quand même, avec les côtes marocaines toutes proches, et là, vers l’ouest, cette ouverture que l’on devine sur l’océan. Et qui nous donne envie de continuer !

 

 

 

 

 

 

 

Après ces deux jours de balade sur le rocher, il est temps d’aller voir plus loin, et nous nous préparons à appareiller. Philippe retend un peu la courroie de la pompe à eau qu’il trouvait un peu molle … et elle se met alors à fuir comme un panier. En quelques minutes, tout le liquide de refroidissement se retrouve dans le fond du bateau ! La pompe est cuite ! Pas moyen de repartir. C’est la guigne encore … Notre voisin de bateau, un Américain, nous console : « Gibraltar, c’est le meilleur endroit pour tomber en panne, on trouve de tout ». Cool … C’est vrai que la nouvelle pompe ne mettra que deux jours à arriver (merci Car Care Center, gentils, serviables, et efficaces !). Mais le temps de la recevoir et de la remonter, et nous loupons de peu le créneau de vent d’est. Là c’est le vent d’ouest fort qui repart. Une fenêtre météo qui se ferme, et c’est la porte de l’Atlantique qui nous claque au nez !

 

Nous restons donc à la porte pour plusieurs jours encore. Bricoles au bateau, balade en VTT jusqu’au Pinar del Rey en passant par la raffinerie, balade à pied en bord de mer depuis La Linea, animée de bécasseaux sanderlings (identifiés officiellement sur photo depuis l’Ecosse par Pierrette) qui cavalent sur la plage pour picorer dans le sable après le passage des vagues.

 

 

Lundi 11 octobre, on tente la traversée du détroit, en s’étant mis dans les bonnes conditions de courant a priori : départ 3 heures après la haute mer à Gibraltar, a priori le courant devrait nous pousser. A priori … En fait, le vent d’ouest est plus fort que prévu, nous l’avons en plein dans le nez, et le courant est contre nous aussi ! On n’avance pas ! Ah par rapport à la mer si, brave Sahaya qui y va à coup de moteur. Mais par rapport au fond, c’est une autre histoire, on est à 2 nœuds … et encore, dans l’autre sens, on recule !! Ah cette tour, ça fait trois fois qu’on la passe, et la repasse ! Au bout de 6 heures de lutte au moteur, et sous la pluie, on abdique. On a fait 8 miles en comptant en ligne droite. Demi-tour, et là miracle, sans moteur et avec un peu de vent arrière, on avance à 6 nœuds … Un vrai tapis roulant … qui nous ramène devant la porte, au mouillage à La Linea de la Concepcion …

 

C’est reparti pour quelques jours d’attente de plus. Y’en a marre de Gibraltar ! Le rocher a perdu de son charme. En plus, la Guardia Civil fait une « descente » dans le mouillage, alpaguant tous les bateaux pour leur dire que le mouillage est interdit et qu’il faut partir. Un des flics parle français, on lui demande des précisions. Il nous dit que le mouillage a toujours été interdit mais qu’il était toléré, mais que dorénavant, les « autorités portuaires » (publiques ?) ont décidé de ne plus le tolérer. Il faut dire aussi que la jolie marina (privée) toute neuve juste à côté est bien vide. Mais seuls les esprits chagrins y verront un curieux mélange des genres et un rapport de cause à effet ! « Lundi, il n’y a plus personne ici », disent-ils avant de partir. Ils reviennent le lendemain, voient d’autres bateaux. De toute façon, on ne voulait pas s’éterniser là, mais ça veut dire que ce mouillage de La Linea, célèbre auprès des voyageurs en transit, ne sera peut-être plus possible sous peu ?

Vendredi 15 octobre, toujours un peu de vent d’ouest, mais qui devrait rester très faible. On décide de retenter le coup, mais en partant très tôt le matin cette fois, pour profiter de la pétole de la nuit. Mais cette fois-ci, on n’essayera pas de tirer des bords, on restera le plus près possible de la côte, en tirant le plus direct possible au moteur. Pour nous avancer, nous traversons la baie d’Algesiras pour aller au mouillage de l’autre côté dans l’Ensenada de Getares. Nous croisons quelques dauphins indolents, que font-ils dans cette baie industrielle ?

Arrivés au mouillage, on part se dégourdir les jambes à Getares. Quand on revient de notre balade, il n’y a plus qu’un seul bateau au mouillage, le nôtre, une seule annexe sur la plage, la nôtre, autour de laquelle tournent deux flics d’un air très perplexe, comme deux poule(t)s qui auraient trouvé un couteau … On observe la scène de loin, en arrivant par le bout de la plage. Presque blasés … comme le vétérinaire avec la Noiraude : « Qu’est-ce qui ne va pas encore ? » Interdiction de mouiller ? Interdiction de débarquer ? On n’a rien vu d’écrit de tel. On s’approche, « Que pasa ? ». Ils nous demandent si le voilier est à nous ? Oui. C’est interdit de mouiller ici, ici c’est une plage, il faut aller dans les ports, le bateau c’est fait pour aller dans un port, mais qu’est-ce qu’on fait là vraiment ? En plus, je n’avais pas pris nos papiers pour cette courte balade … Bon, c’est bon pour cette fois, mais, nous préviennent-ils, ailleurs on aurait eu une amende, ou bien même nous serions allés au poste. Décidemment … « La mer, dernier espace de liberté », dit-on parfois. Oui … Mais à condition de ne pas s’arrêter. Ou en tous cas pas n’importe où !… Mais peut-être qu’ils ont des consignes strictes avec les clandestins, et le trafic de drogue dans le secteur.

On comprend finalement pourquoi ce mouillage est interdit : qu’est-ce qu’il est rouleur !! A chaque ferry qui passe, c’est parti pour la balancelle, et il en passe quand même un nombre certain, même de nuit. Mais la nuit est courte, nous sommes debout à 3 heures ce samedi 16 octobre, pour affronter le détroit !


24/10/2010
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Dans le grand bain

Dans le grand bain

 

 

Allons, arrêtons ce suspense terrible … mais oui, cette deuxième tentative était la bonne ! On l’a eu le détroit, un peu à la peine quand même, vent dans le nez, au moteur, mais vaille que vaille on est passés !

Ça y est, on est dans l’Atlantique pour de vrai ! Nous allons sur Sancti Pétri, au sud de Cadiz, rejoindre nos amis Sophie et Veit, qui sont au mouillage là-bas avec Moemoea (allez faire un tour sur leur blog http://moemoea.over-blog.net/ pour connaître leur sacrée aventure !). Nous prenons le corps-mort libre d’un copain à eux. Nous sommes dans l’estuaire d’une rivière, en fonction de la marée et du vent, ça peut être sport pour rentrer, mais ce samedi, c’est assez tranquille.

 

Moemoea au mouillage à Sancti Petri

 

Sophie et Veit sur leur "kaya marrant"

 

Expédition courses à Chiclana de la Frontera

 

Changement complet d’atmosphère : les marées, la respiration de l’Atlantique, les grandes plages de sable, des marais alentours avec une multitude d’oiseaux, bécasseaux, courlis, et autres échassiers que je ne connais pas.

 

 

 

Plage bondée ...

 

Nous y passons une semaine tranquille, soirées avec les amis à bord de Moemoea et de Sahaya, footing sur la longue plage, expédition courses à Chiclana, soirée tapas hier soir au bar de l’association des pêcheurs Sancti Petri  …

… car nous appareillons d’ici dix minutes en même temps que Moemoea pour Madère ! Nous sommes le dimanche 24 octobre, les conditions météo sont bonnes a priori.

Mais n’empêche, c’est la première petite traversée atlantique, et on a un peu le trac …

Rendez-vous à Porto Santo !

 

Le nez face à la rivière à marée descendante

 


24/10/2010
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Vous avez dit alizés ?

Vous avez dit alizés ?

 

Dimanche 24 octobre en fin d’après-midi, Sahaya quitte le mouillage de Sancti Pétri dans le sillage de Moemoea. Une semaine ici pour nous, un an pour Sophie et Veit. Ils partent avec Kike, leur ami espagnol, comme équipier. Passer entre les paires de bouées marquant le chenal, puis la chicane, et puis c’est la mer libre. Ça y est, c’est parti pour la première traversée atlantique ! 550 miles jusqu’à Porto Santo. On croise les doigts ! On se suit. Veit bataille un peu avec sa grand’voile, voilà ça y est. Puis le génois, et puis l’artimon. Bien toilée, Moemoea a un petit air de jonque sur l’eau.

 

 

 

En route Moemoea !

 

Notre petite flottille s’éparpille rapidement. Nous sommes au près, et Moemoea remonte moins serré que nous. Philippe m’avait fait l’article sur la houle de l’Atlantique : ample, longue, souple, du velours quoi … Ouais ouais ouais … En fait, elle ressemble à deux gouttes d’eau à celle de la Méditerranée : courte, croisée, pénible !! Il me mène en bateau !!

Pendant que le premier soleil de la traversée se couche, Philippe et Veit conversent à la VHF, canal 72 :

-          Moemoea, Moemoea de Sahaya

-          ici Moemoea

-          alors, comment ça va chez vous ?

-          ça va, Kike est un peu malade, et chez vous ? …

-          Nathalie est un peu malade aussi …

 

Hé oui, avec cette houle désorganisée, je suis vite dans le coma … Moi qui pensais être encore amarinée, c’est vexant ! Je tente le Mercalm à coups de demi-comprimés, ce qui permet de n’être qu’à moitié nauséeuse, et à qu’à moitié assommée … Savoir si c’est un bon calcul ?...

 

Plaisance, stade 1 ...

 

Plaisance, stade 2 : en progrès ...

 

Première nuit de traversée, Philippe prend le premier quart, et puis on alterne, toutes les trois ou quatre heures, selon la forme. Nous sommes juste après la pleine lune, et la nuit est très claire. Nous croisons quelques bateaux. Le vent adonne, et nous pouvons rapidement lofer pour prendre le bon cap pour Porto Santo.

Les deux journées et nuits suivantes se ressemblent : beau temps, ciel clair, lune généreuse, houle croisée pénible, Philippe assurant les manœuvres de voile, les veilles radio pour la météo, bulletins et réception des cartes, moi la plupart du temps allongée soit dans la cabine, soit dans le cockpit, manquant quelque peu de présence et de répondant ... J’ai l’impression de me diluer dans cet espace liquide et mouvant, dans ce temps qui s’écoule presque sans repères, mis à part les quarts qui rythment les nuits. Heureusement, nous avançons bien, 6 ou 7 nœuds, des pointes à 8,5 même. Je regarde avec plaisir diminuer les miles restants sur l’écran du GPS !

 

Réception de fax météo en cours avec la BLU

 

Mercredi 27 octobre, troisième jour de traversée, et la houle s’apaise enfin. Surtout, elle se décide à ne venir que d’un côté, plus de l’arrière, et ça change tout (pour moi !...) ! En contrepartie, le vent commence à faire des siennes, on ne peut décidément pas tout avoir ! Il passe quasi vent arrière, et s’affaiblit. Les voiles nous font mal à claquer à chaque coup de houle, Philippe décide de tangonner le génois en ciseau pour lui donner un peu de tenue. Et la grand’voile a droit à sa retenue de bôme pour rester tranquille. La vie reprend, un rythme s’installe, et nous commençons peut-être à toucher du doigt ce que pourrait être une expérience de longue traversée. C’est le moment d’étrenner notre ligne de traîne « montage pro », achetée aux puces nautiques de Sète ce printemps : trois petits poissons gélatineux, suivis d’un leurre à bavette identifié comme un « semi-plongeant » dans notre littérature de néophytes « Tout savoir sur la pêche à la traîne » et « Bien débuter la pêche aux leurres ». Allez hop, à l’eau ! Il me semble que l’ensemble danse une drôle de gigue à l’arrière du bateau ? Un peu plus de mou ? La nuit tombant, je remonte la ligne : le semi-plongeant a plongé définitivement, dans le grand bleu ou dans la gueule d’un monstre marin, en tout cas y’a plus rien au bout de la ligne ! Quatrième nuit en mer, la lune se lève plus tard, plus petite, et rousse au sortir de l’eau. Aucun autre bateau, rien que nous sur la mer …

 

Quand la houle s'apaise ...

 

Jeudi 28 octobre, quatrième jour de mer. Il fait toujours beau. Au petit matin juste avant d’aller me coucher à la fin de mon quart, je viens aider Philippe à détangonner le génois, l’écoute claque, remonte le long de la joue, m’embarque à moitié l’oreille, et plotch ! Les lunettes à la baille ! Ben voilà, j’ai gagné ma journée … Toujours mettre un cordon …

Ce quatrième jour est le plus chouette, la mer s’est bien calmée, l’air est plus chaud. Et même si le vent de ouest-sud-ouest nous oblige à faire un cap un peu trop nord (mais la météo indique qu’il devrait passer nord cette nuit ce qui devrait nous permettre de reprendre le bon cap et d’aller vite), nous nous sentons bien dans ces instants, sur le bateau, voguant au milieu de nulle part, vers l’espérance d’une île. Philippe installe un système pour mettre des enceintes dans le cockpit, et c’est la musique d’Hadouk Trio qui accompagne le souffle du vent dans les voiles et le glissement de l’eau. Là oui, on la sentirait bien la traversée de l’Atlantique !

Après la ligne de traîne, c’est le moment d’étrenner la canne à pêche ! Montage du bas de ligne avec le nœud de cuillère comme c’est dessiné dans le bouquin, installation d’un support de canne sur le balcon arrière, et hop ! A l’eau, à tribord, et la ligne de traîne à bâbord, pour multiplier les chances de prise. Y’a plus qu’à attendre … Et espérer ? En fait, je crois que secrètement, j’espère ne pas prendre de poisson … Parce que je n’ai pas très envie de tuer un poisson … Cela dit, j’aime bien le poisson. Position complètement hypocrite donc. Heureusement, les poissons me font la gentillesse de ne pas avoir à affronter cette contradiction aujourd’hui encore. La nuit approche, je plie !

 

Drapeau de courtoisie : du cousu main

 

« Bon alors, elle est où cette île ? », demande Philippe. On devrait la voir. Héééeee … mais oui là, juste à gauche du soleil couchant, cette silhouette sombre, ces pics … Mais oui c’est elle, c’est sûr c’est elle, c’est Madère ! On est comme deux gosses ! Emerveillés, heureux, de voir cette île à portée de main !

 

C'est pour bientôt !

 

A portée de main … à condition d’avoir le bras long quand même. Mais si le vent passe au nord dans la nuit comme promis, on sera à Porto Santo au très petit matin … enfin au petit matin … disons le matin une fois que le vent du nord se sera levé … en matinée quoi … fin de matinée … Ah le bateau … un terrain d’expérimentation d’une foule de théories sur la relativité : « Plus t’es près, plus ça dure », « Plus t’avances, moins t’arrives », etc. Le vent du nord, quel vent du nord ? Du bon vent d’ouest oui, fort, en plein dans le nez donc, pour nous faire tirer des bords au moteur. Vous la voulez votre île, celle qui vous paraissait si proche hier soir, et bien il faut la mériter ! Nous entrons vers midi ce vendredi 29 octobre dans le port de Porto Santo, sous un grain soudain, vent et pluie, qui ne facilite pas l’accostage. Nelson, de la marina, vient nous aider à nous amarrer, Arthur, un navigateur anglais aussi. Obrigado ! Thanks !

 

Ça y est, on y est. Traversée en 4 jours et demi. Et contents d’être arrivés. Vous avez dit alizés ?? Pas vu la queue d’un !

 

A nous Porto Santo !


17/11/2010
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Porto Santo ... pour l'apéro !

Porto Santo … pour l’apéro !

 

 

Vendredi 29 octobre au port de Porto Santo. Après une petite pause déjeuner bien méritée à l’abri dans le carré sous le grain qui se calme, nous sortons poser nos premiers pas sur la terre portugaise. Avec les cirés quand même, on n’est jamais trop prudents … Tout au long des murs de la digue, les navigateurs de passage ont laissé leur trace : parfois juste le nom du bateau et l’année, d’autres le prénom des équipiers, d’autres encore des dessins plus ou moins sophistiqués. C’est sympa, on en découvre de nouveaux à chaque fois qu’on longe le mur. « Why is the wind always on the nose ?? ». C’est mon préféré ! Il sent tellement le vécu ! Derrière la digue s’étend une grande plage de sable de plus de 7 kilomètres de long qui occupe quasiment toute la côte sud, et qui vaut à Porto Santo son surnom « Ilha Dourada ». Les Madériens viennent y chercher en ferry ce qui manque sur leur grande île : de quoi farnienter sur du sable fin !

 

De la lecture en chemin ...

 

"Why is the wind always on the nose ???" : rien de nouveau sous le soleil ...

 

Un petit café au bar du coin, où l’on attend que l’averse se calme. Il va falloir s’y faire, c’est l’Atlantique ! Et le climat qui va avec, alternance d’éclaircies et d’averses, d’air chaud et d’air frais, et de belles lumières contrastées. Profitant d’une accalmie, on file remplir rapidement les formalités : la douane d’abord, puis la capitainerie de la marina, où l’on est accueilli en français avec un joli accent chantant. Le soleil revient, et nous allons faire une reconnaissance à pied vers la ville « Vila Baleira » distante de trois kilomètres. Emportés par notre élan d’explorateurs (et ma lecture vaporeuse de la carte …), nous la dépassons allègrement ! Ah oui, c’était donc bien ça le centre ville ! Un petit tour à l’office de tourisme où l’on est accueilli en français encore, pour récupérer une carte de l’île et quelques idées de balades. Pas de nouvelles de nos amis Sophie et Veit sur Moemoea … Où sont-ils ? Avec les vents d’ouest qui sévissent, il ne doit pas faire bon sur la route de Madère, peut-être ont-ils obliqué pour les Canaries ?

 

Le lendemain, nous voilà d’attaque ! Nous partons à pied depuis la marina, suivant le petit chemin qui part vers l’est pour aller à la Punta da Galé. Un panneau met en garde contre les risques de chutes de pierres, c’est vrai que le chemin passe au pied de la falaise qui est un vaste éboulis avec des blocs ne demandant qu’à tomber … Mais sans pluie ni vent et en passant vite ça devrait le faire !! Un petit tunnel permet de passer de l’autre côté de la pointe, et de mieux voir les reliefs. Nous visons le premier, le Pico de Concelho à 324 m de haut, qui donne une belle vue sur la partie est de l’île … et permet de voir qu’elle est petite et que tous les sommets se tiennent dans un mouchoir de poche ! On redescend un peu pour viser cette fois le Pico de Gandaia à 484 m où il faut un peu mettre les mains à la fin, et son voisin et grand frère le Pico do Facho, plus haut sommet de l’île avec 516 m. Philippe est tout heureux de retrouver des ambiances de l’île de la Réunion où il a passé plusieurs années. Le brouillard et la pluie nous accueillent au sommet. Nous redescendons au col, et allez un dernier petit pour la route : le Pico do Castelo à 437 m, avec un joli jardin aménagé et une statue en hommage à António Schiappa de Azevedo, l’instigateur de la reforestation de Porto Santo au début du siècle dernier. « L’homme qui plantait des arbres » … Mieux que des bombes à retenir par l’Histoire non ?… Retour à la marina sous des averses par des chemins de traverse à la terre « amoureuse », bien collante !

 

Du haut du Pico do Concelho

 

En arrière plan, le Pico Branco

 

 

Vue vers le sud-ouest depuis le Pico do Castelo : le temps se gâte ...

 

Samedi 30 octobre, nous sortons les VTT du garage pour aller explorer la côte nord, avec une visite à ce qu’on suppose être les vestiges d’une ancienne petite station thermale. Une passerelle en béton court encore à flanc de falaise, et mène à un petit bâtiment où coule une source. Je goûte, un peu salée … Je me demande si elle est en relation avec la Fonte de Areia, source thermale « officielle » un peu plus à l’ouest, aux vertus vantées par toute une installation touristique. Nous ne nous attardons pas, et continuons notre boucle, pour bifurquer vers le sud en longeant le golf qui barre le sud-ouest de l’île dans quasiment toute la largeur. Toujours difficile de comprendre cet engouement pour les terrains de golf au vert arrogant dans des îles qui manquent d’eau …

 

 

En roue libre ...

 

 

Lundi 1er novembre, jour des morts en avance : tous les chasseurs de l’île semblent de sortie ! Et vus le nombre et la surface de l’île, ça doit faire une belle densité ! Venus en voiture attelée d’une remorque grillagée, avec des chiens qui ressemblent à des lévriers maigrichons à oreilles de lapin. Camouflage ?? C’est vrai qu’on a vu détaler pas mal de pompons blancs en balade ! Nous suivons la petite route qui monte en serpentant pour nous amener au départ du chemin qui grimpe au Pico Branco (450 m) en suivant la crête, puis se prolonge pour atteindre le refuge de Terra Cha. Jolie vue sur la pointe nord-est de Porto Santo.

 

Pause sur la route vers Portela

 

En redescendant du Pico Branco

 

Nos montures nous ont attendus !

 

Dans la campagne dans le nord de l'île

 

 

 

 

 

 

 

Nous passons donc un séjour bien sympathique à Porto Santo. Le bar du coin (de la marina) est le lieu de rendez-vous des gens qui attendent le ferry de retour vers Madère. Le temps de notre séjour, nous verrons des amateurs de rallyes sur les routes : rallyes de 4L, de vieilles Coccinelles, de motos plus ou moins grosses. Le séjour est aussi bien agrémenté par une rencontre chaleureuse avec nos voisins de bateau, Dominique et Yves, un couple de Québécois en vadrouille sur « Rusée de Jersey » (http://web.me.com/rusee_de_jersey). Nous sympathisons vite, longues discussions sur les pontons, dans notre bateau, dans le leur, sur tout, les goûts, la musique, les voyages, le bateau, la vie quoi !

 

Sahaya dans la marina de Porto Santo

 

Enfin des nouvelles de Moemoea !! Un texto de Veit arrive le mercredi 3 novembre : « Riders on the storm », ils sont arrivés aux Canaries, sur l’île de Gran Canaria. C’est bien ce que l’on pensait, la route de Madère n’a pas coulé de source pour Moemoea. On se donne rendez-vous plus bas, aux Canaries ?

Pour notre dernier jour à Porto Santo, et avant de remiser les vélos au garage, nous filons à l’extrémité sud-ouest de l’île, à la Ponta da Calheta, voir les deux houles qui s’affrontent. Quelle riche idée ! A peine arrivés à la pointe, une grosse vague vient éclater derrière Philippe et le rince de la tête aux pieds. Je ne suis guère mieux lotie, réussissant à être tout juste la plus présentable des deux (y’en a un que ça arrange bien …) pour faire des courses après séchage sur la route du retour … L’après-midi, nous visitons le petit musée consacré à Christophe Colomb. Pas grand grand-chose à voir, mais ce n’est pas ruineux non plus … Les maquettes de bateaux sont finalement ce qu’il y a de plus intéressant : des reconstitutions des navires de la flotte de Colomb, et aussi un bateau plus petit et beaucoup plus récent, qui servait de « ferry local » entre Porto Santo et Madère … avant les NGV !

 

Ferry local transportant veaux, vaches, couchons, couvées entre Porto Santo et Madère

 

Départ le jeudi 4 novembre pour Madère, dans le sillage de Rusée de Jersey, enfin pas tout à fait car ils font route vers l’île de Lanzarotte aux Canaries. Rendez-vous là-bas les rusés ! Et en attendant, à nous Madère !

 

Tchau Porto Santo !


02/12/2010
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Et Madère ... pour le dessert !

Et Madère … pour le dessert !

 

 

Jeudi 4 novembre. La silhouette de Porto Santo diminue comme grandit celle de Madère. Nouvelle île, nouvelles découvertes en perspective. La navigation est courte et rapide avec un bon petit vent, et une belle houle aussi. A la Ponta de Sao Lourenço, comme un doigt crochu qui pointe depuis l’extrémité est de l’île, la mer est comme une marmite, animée de drôles de bouillonnements, sans doute des courants bagarreurs. Nous passons un peu au large, avant de pointer vers la marina de Quinta do Lorde, à l’abri derrière sa digue imposante. Un marinero vient nous accueillir en zodiac avant notre arrivée, il parle français. Ok, il nous attend dans le port pour nous indiquer une place. Nous voilà donc à Quinta do Lorde, la marina est bordée d’un village moderne créé de toutes pièces avec son église, sa place, ses maisons, sur les parties les moins raides des pentes. Et il est désert ! Les travaux sont apparemment en plan, et tant que tout n’est pas fini, même les maisons et appartements habitables ne peuvent être occupés. Résultat de cette politique, seule la marina fait vivre quelques maisons en façade : capitainerie, toilettes, buanderie, et le bar, au bout du quai. Mais qu’à cela ne tienne, nous venons surtout chercher ici un « pied à mer » sûr pour le bateau (surtout qu’une forte houle de nord est annoncée la semaine prochaine) et qui nous permette de partir en exploration de cette île célèbre pour ses randonnées. Et à la marina, ils compensent l’isolement du lieu par leur gentillesse et la qualité du service.

 

La marina de Quinta do Lorde dans son décor de théâtre

 

Nous faisons connaissance avec nos voisins de tribord, Jean-Guilhem et Sophie, Sarah et Margot, et Xavier, sur le voilier « Yakapar ». Ils font les pleins, gasoil et eau, pour partir le lendemain sur le Cap Vert. « Vous dînez avec nous ? ». Ben ok, on amène quoi ?? Invitation improvisée et bien sympa à bord de Yakapar.

 

Le lendemain, un beau ciel bleu nous accueille et incite à la balade. Un petit coup d’œil au guide de randonnées Rother que nous ont offert ma sœur Blandine et Arnaud, avec l’intention d’en profiter avec nous, mais hélas avec tout le retard accumulé au cours de notre périple, ils ne pourront finalement pas venir nous rejoindre. Dominique et Yves nous avait aussi donné un autre guide de randonnées qui passe de bateau en bateau : « La forêt d’eau », puis « Bidule », puis « Rusée de Jersey », puis « Sahaya », et puis ? Nous jetons notre dévolu sur la Ponta de Sao Lourenço, randonnée la plus proche. Un au revoir en passant à l’équipage de Yakapar qui est sur le départ, quoique … ils viennent de se rendre compte qu’ils ont versé hier soir les 50 litres de gasoil dans le réservoir d’eau ! C’est donc parti pour une séance Shadock chez les voisins, peut-être à tout à l’heure ? La balade à la Ponta de Sao Lourenço est courue … très courue … c’est même carrément le boulevard ! Des cars entiers de touristes qui débarquent au col. Pour la photo, pour quelques mètres ou plus. En poursuivant la balade, la sélection naturelle éclaircit les rangs !... Mais ça vaut le coup quand même. De retour à la marina, nous constatons le branle-bas de combat chez Yakapar : le réservoir d’eau est démonté et sèche sur le ponton, pour évaporer son odeur de gasoil. Le temps de remonter, ils ne partiront donc que demain. Nous réservons une voiture de loc’ pour le soir. Demain, on attaque les sommets !

 

 

Vers la Ponta do Sao Lourenço

 

Samedi 6 novembre, Yakapar prend son élan vers le large, et nous vers les petites routes sinueuses de Madère. La route monte jusqu’au Pico do Areeiro à 1818 m, et de là nous voilà partis plein d’entrain sur le chemin de crête qui doit nous conduire au Pico Ruivo, le sommet de l’île à 1862 m. Hélas au bout de même pas 500 m, notre bel élan est coupé net par une barrière rédhibitoire : chemin fermé pour cause de l’incendie de cet été … Ah ! Quelle déception !! En bons franchouilles, on essaye de voir si on ne peut pas contourner l’obstacle, mais non quand même c’est du sérieux !... Qu’à cela ne tienne, si la face sud résiste, nous l’attaquerons par la face nord ! Hop, nous revoilà en voiture, pour gagner la côte nord, et monter à l’Achada do Teixeira à 1592 m, un autre accès pour le Pico Ruivo. Philippe part à l’assaut du sentier comme à son habitude : à fond de train. Il aurait vraiment dû faire pompier, avec lui on dirait toujours qu’il y a le feu quelque part ! A propos de feu … nous arrivons trop tard car il est aussi passé par là … Ou trop tôt car notre espoir de pouvoir récupérer le chemin de crête de ce côté-là part en fumée aussi : le verdict est le même, chemin fermé. Seule la montée au Pico Ruivo est ouverte. Nous voyons le chemin que nous n’avons pas pu prendre depuis le Pico do Arieiro, et le regrettons amèrement car il a l’air superbe : escarpé, à flanc de falaise, caracolant de col en sommet. C’est un spectacle de désolation, du noir partout, des squelettes d’arbres, encore une odeur de fumée dans l’air. Cet hiver, les coulées de boue risquent d’être ravageuses sans la végétation pour retenir la terre. Le sommet du Pico Ruivo donne une vision panoramique de Madère, le ciel est clair, les nuages orographiques couronnent la base des reliefs. Dommage, c’était le temps idéal pour profiter de la montagne. Un petit pinson s’invite à notre pique-nique, puis nous redescendons.

 

 

Depuis le Pico Ruivo. Quel dommage de ne pouvoir continuer !

 

Un joli ramasse-miettes !

 

Sur le chemin du retour, nous accrochons notre première randonnée de « levada » à notre palmarès. Les levadas sont les canaux d’irrigation qui épousent la topographie de Madère en un réseau serré, de l’ordre de 1400 km pour une île d’un peu plus de 700 km2. Et qui font sa renommée pour les randonnées, car les canaux sont bordés de chemins d’entretien, plus ou moins larges, plus ou moins exposés, et plus ou moins vertigineux en fonction de la levada : levada de forêt, de campagne, ou de montagne. Notre première levada donc, c’est celle qui conduit au Caldeirao Verde. Après une première partie un peu longuette à croiser des troupeaux de randonneurs allemands nous donnant d’emblée du « Hallo », la fin est plus rigolote avec le chemin qui se rétrécit et passe par des tunnels pour arriver à la cascade finale du Caldeirao Verde. De là on peut enquiller une deuxième levada, plus exposée, plus vertigineuse, qui mène au Caldeirao do Inferno. Vous nous connaissez … évidemment on y va ! Effectivement, cette levada est moins aménagée que la première, et par endroits il ne faut pas tomber car il n’y a pas de garde-fous. Plusieurs tunnels encore, et puis on arrive au bout de l’enfer : quel cirque !! Avec tout ça, il n’est pas de bonne heure, et nous rebroussons la levada, d’abord au pas de charge sur les parties aventureuses, puis au petit trot quand le chemin s’élargit, pour arriver à la voiture tout juste avant la nuit. Une bonne journée quoi !

 

 

Mimétisme ...

 

Le début du chemin vers l'enfer, dans un vert de paradis !

 

 

Dans l'entrée du tunnel

 

Lendemain dimanche, le brouillard s’est invité sur les sommets, et depuis le Pico Ruivo do Paul « la vision panoramique depuis le mont le plus haut du plateau de Paul da Serra » fait fortement appel à l’imagination … Nous tentons notre chance plus vers l’ouest, du côté de Rabaçal avec des promesses de levada « enchanteresse » conduisant à 25 sources. Mais nous ne sommes pas du tout enchantés par le nombre de voitures arrêtées au parking du départ ! Trop de monde, et trop de brouillard : une autre fois. Après un petit tour par Porto Moniz campé à la pointe nord-ouest de Madère, nous finissons la journée par deux lévadas formant une boucle au départ de Lombada da Ponta do Sol, sur la côte sud : montée par la levada Nova et descente par la levada do Mainho, qui surplombent la vallée de Ribeira da Ponta do Sol. Le départ n’est pas facile à trouver, et nous faisons des allers-retours sur la route, mais un monsieur avec sa bêche sur l’épaule s’arrête près de nous et nous montre : « levada ». Obrigado ! Puis quelques maisons plus loin, autre hésitation, et là c’est un bras de dame qui se tend spontanément depuis une fenêtre : « levada » ! Jolies levadas le long desquelles on glanera quelques chouchous (ou cristophines ou chaillottes, qui finiront en gratin, encore des souvenirs de la Réunion pour Philippe !), avec de chaudes lumières du soir au retour, éclairant les jardins et les cultures en terrasses.

 

Pico Ruivo do Paul : "randonnée à faire par temps clair" stipule le guide ...

 

Cascade au bout de la levada Nova

 

 

Retour dans les couleurs de l'automne

 

Il restait encore une levada classée « noire » dans notre guide, c’est le programme de lundi. La levada do Norte au départ de Boa Morte commence tranquillement à travers une forêt d’eucalyptus, puis se rétrécit pour surplomber alors la grande falaise de plus de 200 m de haut plongeant vers la Ribeira da Serra de Agua. Plus de barrière de protection, et y’a du gaz ! La randonnée s’achève comme la paroi se redresse. Pourtant, la levada continue bien après, étroit canal épousant les contours de la roche. C’est incroyable de penser aux travaux de topographie et de maçonnerie qu’il a fallu pour construire ces levadas à flanc de falaise, ces tunnels, avec des moyens sans doute modestes ! La levada do Norte est en cours de réfection, mais de façon moins poétique et esthétique quoique peut-être plus efficace contre les éboulements: un tuyau gainé de plastique occupe maintenant le petit canal bétonné.

 

 

Au-delà, ça devient plus scabreux ...

 

Ouvrir l'oeil sur le décor ...

 

... et sur ses pieds !

 

Le temps se dégage sur les hauts, et nous en profitons pour retourner sur le plateau de Paul da Serra. Depuis le belvédère de Bica da Cana, à 1620 m, le fameux Pico Ruivo do Paul se révèle derrière une rangée d’éoliennes, et vers l’est les sommets émergent, le Pico Ruivo, le Pico do Arieiro, le Pico Grande, dressant un rempart hérissé de pointes devant l’armée silencieuse et cotonneuse des nuages venue du nord et enjambant le col pour couler sur les versants sud.

 

Vers l'ouest ...

 

Et vers l'est ...

 

Déjà mardi, que le temps passe vite sur cette île, et il reste encore tellement à découvrir ! La houle de nord-ouest consécutive à une grosse dépression située plus au nord (et qui génère un avis de fortes vagues sur le golfe de Gascogne) commence à arriver sur Madère. La Boca do Risco (« ouverture dangereuse ») nous permet de basculer sur la côte nord, et de voir les premiers trains de houle blanchir les pieds des falaises. Nous pousserons jusqu’à la pointe Espigao Amarelo avant de rebrousser chemin. Fait trop beau … et la montagne nous appelle encore. Allez, une petite balade au départ du Poço da Neve à 1650 m. Un igloo de basalte abrite une ancienne glacière, et le chemin continue à travers le Parque Ecologico do Funchal. Le pauvre a pris un sérieux coup dans l’aile avec l’incendie de l’été … Même les tuyaux des levadas ont eu un gros coup de chaud et se contorsionnent dans les squelettes de buissons. Seules les fougères sont reparties en pionnières du vert, crosses d’évêque qui pointent pour prêcher la bonne parole en ces terres désolées : croissez et multipliez-vous !

 

Arrivée à Espigao Amarelo

 

 

 

Ca a dû chauffer ...

 

La vie reprend ...

 

Mercredi 10 novembre, la houle de nord bat son plein et a apporté la pluie avec elle comme autre témoin de la tempête qui fait rage sur les côtes portugaises. Nous voilà en cirés sur le sentier côtier de Sao Jorge pour regarder la mer en colère. Nous allons jusqu’au vieil embarcadère de Cais, mais ce sont les vagues qui embarquent, hautes de 4 mètres, elles recouvrent l’escalier et la pointe d’une écume bouillonnante. Nous restons à distance respectable, c’est impressionnant.

 

 

 

Ca bouge à la Ponta de Sao Jorge ...

 

Au retour, nous faisons une halte à Funchal, la capitale. La visite au jardin botanique ne restera pas dans nos annales personnelles. Joli jardin certes, mais pas d’un très grand intérêt botanique car peu de plantes présentent leur petit nom. Et le musée d’histoire naturelle fait plutôt figure de musée des horreurs avec de pauvres animaux empaillés tout gris et poussiéreux, et des cailloux sans nom ni provenance. Petit tour du côté du port pour voir à quoi ressemble la marina, et qui n’a-t-on pas la surprise de rencontrer : le petit père Lilian, qui traverse la place à enjambées pressées ! Lilian, un « collègue » de bateau du marigot de Balaruc-les-Bains, parti depuis trois semaines. C’était pour lui le baptême de mer de « Rama », le sloop en acier qu’il a construit entièrement 6 années durant. Et il en est content, ce qui est à noter car c’est rare chez lui, d’être content, du moins de le dire ! Ca fait bien plaisir de le croiser, malheureusement furtivement car nous devons rendre la voiture de location le soir même à Quinta do Lorde pour appareiller demain. Et nous avons aussi rendez-vous avec Philippe (encore un !) devant le Mercado dos Lavradores, car il embarque avec nous. Nous le prenons en bateau-stop entre Madère et Santa Cruz de Ténérife, où un autre bateau l’attend comme équipier pour traverser sur les Antilles.

 

Petit gabarit adapté aux routes de Madère

 

Drôles d'oiseaux ...

 

Et voilà, nous serons restés une semaine à Madère, semaine bien remplie dans cette île attachante, aux parfums de Réunion, aux villages fleuris, aux habitants d’un abord sympathique. On s’y attarderait bien plus longtemps, mais il nous faut avancer et profiter d’un créneau météo pour prendre du sud. Direction Ténérife aux Canaries, devinez pourquoi ?? Pour son volcan bien sûr, le Teide, qui culmine à plus de 3700 m, c’est le sommet le plus haut de l’Espagne qui « flotte » comme ça en plein Atlantique. Mais près de 200 miles nous séparent encore. Tchau Madère, à une autre fois peut-être !


09/12/2010
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Iles Selvagens : un petit rab'

Escale aux îles Selvagens, un petit rab’ de Portugal

 

 

Jeudi 11 novembre, dans la matinée, nous laissons Madère dans le sillage, avec une pointe de nostalgie. On s’y était presque attachés, en tous cas on s’y sentait bien ! Notre route presque plein sud passe près des Ilhas Desertas, de fines écailles de basalte que l’on déroule dans la longueur. Peu de vent pour ce début de traversée, la mer est calme, un peu de voile, un peu de moteur, un peu des deux. Répétitions de guitare pour les deux Philippe dans le carré.

La pêche n’est toujours pas miraculeuse, un deuxième leurre à bavette se fait la malle, et rien au bout du fil ! Le soir, les quarts s’organisent, à trois ça permet de ne faire qu’un quart par nuit, c’est plus reposant !

 

Traversée tranquille

 

The Philippes' jazz band

 

Notre objectif est de couper la route de Ténérife en deux ou plutôt aux ¾ en faisant escale aux îles Selvagens, qui font aussi partie de l’archipel de Madère, à 155 miles de « l’île mère ». Elles sont classées réserves naturelles, et il a fallu demander un permis pour pouvoir y faire escale. Nous visons l’Ilha Selvagem Grande, qui abrite un petit mouillage tenable seulement par très beau temps, sans houle. Les îles ne sont pas sauvages pour rien : défendues par des cailloux qui ne sont que très partiellement cartographiés, elles ne peuvent s’aborder que de jour. La deuxième journée de traversée, nous ralentissons donc un peu l’allure pour arriver à l’Ilha Grande dans la lumière du petit matin. Le catamaran « Chamalou » qui a quitté Quinta do Lorde le même jour que nous est à l’ancre un peu au large, il a dû aussi attendre l’aube pour s’aventurer plus près. Le mouillage de l’Enseada des Carragas est une petite crique peu profonde entourée de rochers, au sud de la Punta da Atalaia. Des rochers, il y en a au fond aussi, et Philippe part pour son expédition « Comex » rituelle à l’arrivée au mouillage pour aller vérifier la tenue de l’ancre, mais cette fois par 15 m de fond, pas évident en apnée. Effectivement, il n’y a presque que des cailloux, heureusement que la météo n’annonce que de la pétole pour la nuit ...

 

On arrive ...


Premier petit tour à terre, le débarquement en annexe s’effectue sur un débarcadère en béton, la maison des gardiens est juste au-dessus. Nous sommes accueillis par Carlos, un des deux gardiens de l’île, qui nous donne rendez-vous en début d’après-midi pour une visite guidée. Il y a deux gardiens en permanence sur l’île Selvagem Grande, avec des relèves tous les 22 jours qui arrivent par bateau en même temps que les vivres. Pendant un an, ils alternent donc 22 jours sur l’île, puis 22 jours à Funchal. Des vivres, il en faut, car un stage survie sur les îles Selvagens ne serait pas une sinécure ! Nous sommes accueillis aussi par la chienne baptisée « Selvagens » qui est née sur l’île et ne la quitte pas ! Les gardiens tournent, elle reste !

En attendant la balade à terre, nous partons en exploration des fonds de l’Enseada des Carragas avec palmes masque et tuba (PMT pour les intimes). Quelques poissons colorés et pas farouches : saupes, poissons clown, girelles, castagnoles. Carlos nous a parlé de mérous mais ils ne se montrent pas.

 

Au mouillage dans l'Enseada das Cagarras

 

Débarquement

 

L’après-midi, nous emboîtons le pas de Carlos sur le chemin qui monte depuis la maison. Il se penche et ramasse une boule de plumes grises à long bec : un jeune pétrel « cagarra », dans son « nid » (si on peut appeler nid un tas de cailloux) à même le sol. Le pétrel dit « Cagarra » est endémique aux Selvagens, et a un sacré destin. Les parents nourriciers partent parfois plusieurs jours pour pêcher vers les côtes marocaines. Quand les petits sont assez « grands », les parents partent en les abandonnant au nid. Pendant un à deux mois, ils vont être seuls, perdre leur duvet et leur graisse de bébé, pour s’envoler. C’est donc un petit abandonné à son sort qui devra faire seul son apprentissage et trouver dans ses gênes, dans ses instincts, dans pleins de choses qu’on est sans doute loin de comprendre et de connaître, ce qui le poussera à s’envoler et à traverser l’océan jusqu’au Brésil, d’où il reviendra au bout de 7 ans pour nidifier sur ce même bout d’île perdu !

 

Un pétrel Cagarra au "nid"

 

Viens par là mon garçon ....

 

Bourreau d'enfant !

 

Carlos nous montre aussi des pièges qui ont été posés, apparemment avec succès, pour éradiquer les rats. Nous montons sur le plateau, petite montée puisque l’île ne prétend pas à plus de 153 m d’altitude avec le Pico da Atalaia. La flore n’a pas non plus des appétits de grandeur, quelques fleurs sèches, pas d’arbustes. Mais les couleurs sont vives, crues, la vue est bien dégagée sur l’océan à la surface tranquille, juste rayée vers le sud-ouest par la silhouette de l’Ilha Selvagem Pequena. Carlos nous déniche un petit lézard aux beaux yeux couleur pierre, endémique lui aussi. Nous redescendons du plateau avec le soleil couchant.

 

 

 

 

Contents d'être arrivés jusque là en bateau !

 

Le mouillage vu de haut

 

Philippe et Selvagens

 

 

 

Dimanche 14 novembre, l’ambiance change. D’abord imperceptible, la houle commence à monter doucement mais sûrement, ambassadrice du changement de temps annoncé et qui nous rattrape dans notre havre de paix néanmoins précaire. Sahaya dérape et est en passe de faire la bise à Chamalou, nous remouillons à une distance plus respectueuse des convenances. Hubert de Chamalou, nous emmène plonger un peu plus au sud du mouillage, mais de gros trains de houle arrivent parfois et je me sens bien petite dans l’annexe … Il ne faut pas trop traîner, le mouillage devient très vite hostile, un au-revoir à Carlos et Jacky, quelques lettres postées qui s’orneront d’un beau tampon « pétrel », et les deux bateaux lèvent l’ancre. Direction l’île de Ténérife aux Canaries : c’est facile, droit devant, en visant le grand cône du Teide, triangle en contre-jour sur l’horizon.

 

L'ambiance a changé, filons !...

 

Début de traversée tranquille, le Teide en ligne de mire

 

Salut Selvagem Grande, la sauvageonne, on gardera de beaux souvenirs d’une soirée de partage autour de la guitare et de chants, avec les gardiens Carlos et Jacky, Hubert et Laure, équipière sur Chamalou, sur la terrasse de la cabane, avec les deux bateaux au mouillage dans ce décor minéral.

 

Le soufflé de coquillage, pas si simple ...

 

Une soirée guitare improvisée et inoubliable

 

Une troupe de dauphins vient nous accompagner, pas trop dérangés par le ronronnement du moteur, car bien sûr la houle est arrivée seule, sans le vent.

Mais ça ne va pas durer ...

 


17/12/2010
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Tenerife : à la montagne

Tenerife : à la montagne

 

 

Dimanche 14 novembre, nous laissons les îles Selvagens à leur sauvagerie et les deux gardiens à leur solitude, ils ne devraient pas voir de bateaux de sitôt avec la météo des jours à venir. La journée se passe au moteur, et le vent se lève en cours de nuit, pendant le quart de Philippe (le capitaine), il a bien choisi son heure ! Un premier ris dans la grand-voile, puis un deuxième, la houle s’amplifie, venue du nord. On arrive en vue de Ténérife, enfin en vue, c’est une vue de l’esprit car nous voilà comme en Mer du Nord, dans le gris, le vent, le froid, les grains qui se succèdent, masses noires sur l’horizon gris : quel temps de chien aux Canaries !

 

Gris devant ...

 

Gris derrière ...

 

Fait meilleur dedans !

 

 

Arrivée près de Santa Cruz de Ténérife : ça frise après la pluie !

 

Nous rentrons dans le port de Santa Cruz pour déposer Philippe. Pendant qu’il cherche le ponton F et le Mélodie qui doit l’embarquer, nous allons demander les tarifs. Et là, mauvaise surprise ! La place est à 20 €/jour, ce qui est raisonnable, mais à cela s’ajoutent des taxes (c’est nouveau depuis cette année dans les ports publics de l’Espagne) : taxe de signalisation maritime (celle-là, il fallait l’inventer), et une autre encore, le tout pour 48 € ! Total, près de 70€ la nuit ! L’Espagne fait décidément bien payer sa crise ! Du coup, on lève le camp dans la demi-heure qui suit, en réembarquant Philippe qui n’a trouvé ni ponton F ni Mélodie. Direction la marina (privée) de San Miguel, qui n’est pas encore sur nos cartes, mais un petit coup de Google Earth nous a permis de la situer exactement. Heureusement car elle est au sud de Ténérife, nous n’arrivons qu’à la nuit noire et l’approche est délicate. Philippe consulte ses mails à l’arrivée : le Mélodie était en fait à Santa Cruz … de La Palma, et ne l’avait de toute façon pas attendu ! Il reste donc avec nous jusqu’au Cap Vert.

 

Le temps s'améliore vers le sud

 

La marina San Miguel est parfaite pour les amateurs de golf : ils sont gâtés ! Pour les autres : ils sont cernés ! Et une voiture est plus que bienvenue pour s’échapper ! Notre première visite est pour le Parc National du Teide, ce grand volcan qui pointe à 3718 m. Dommage qu’il soit si compliqué de pouvoir monter jusqu’en haut : il faut s’inscrire sur Internet pour un jour et une heure précis (pas plus de 50 personnes au sommet par tranche de 2 heures), et tout est complet pour les jours qui viennent. En attendant, nous faisons une balade au départ de Canada Blanca jusqu’à l’Alto de Guajara, à 2712 m, qui donne une belle vue sur le cirque du Teide et ses différentes coulées de lave. La plus récente a beau dater de plus de 200 ans, la végétation n’a pas repris. A la Réunion, il y aurait des arbres, mais il y pleut aussi 10 fois plus !

 

Sahaya à la marina San Miguel, sur fond de Teide

 

Comme si vous y étiez ...

 

 

 

Au-dessus des nuages

 

 

Le lendemain, nous irons en voiture jusqu’à l’extrémité ouest de Ténérife, au Faro de Teno, en prenant à l’aller la petite route de montagne escarpée entre Masca et Buenavista del Norte, où il faut laisser passer les bus dans les virages à lacets.

 

Aïe aïe aïe ! Ouille ouille ouille !

 

 

La côte ouest vue du Faro de Teno

 

A défaut du Teide, nous montons au sommet du Pico Viejo, cône volcanique à 3134 m. Un peu plus de 1000 m de dénivelée. Au sommet, la vue s’ouvre sur le Teide bien sûr, mais aussi les autres îles des Canaries : La Palma, et La Gomera. L’ambiance est minérale, et ce qui frappe, c’est le silence : peu d’insectes bourdonnants, pas d’oiseaux jouant avec le vent comme en haut des sommets des Alpes et des Pyrénées. Mais le silence ne dure pas car Philippe (le cap’tain), au bord du cratère du Pico Viejo dont il doit pressentir les qualités acoustiques, se met à faire des vocalises polyphoniques reprises par l’écho : un garçon d’ordinaire si discret ! Elles sortent Philippe (l’équipier) de sa sieste réparatrice et méritée. De toutes façons, il est temps de redescendre !

 

Dans la montée au Pico Viejo

 

On y est, le Teide est juste derrière

 

 

Les deux Philippe, La Palma en arrière plan

 

La chambre d'échos du Pico Viejo

 

 

 

Dans le ton ...

 

 

 

Les jours suivants, nous testerons l’escalade à Ténérife, sur les petites voies équipées des sites de El Rio, et surtout de Arico, considéré comme le « must » de Ténérife. Effectivement, il y a pas mal de grimpeurs, mais surtout regroupés dans les rares secteurs où sont disséminées les quelques voies en 5c / 6a ! Les Canariens équipent de façon moins démocratique qu’en France, et il faut grimper dur pour avoir le choix !

 

 

Il ne pleut pas souvent : les prises restent blanches de pof !

 

Nous testerons aussi deux grandes voies en terrain d’aventure, sur la « Catedral » dans le secteur « Roques de Garcia » du Parc du Teide. Belle ambiance et belles lumières dans un paysage somptueux, mais l’équipement est très « espagnol » comme dirait notre ami Veit et donc l’escalade est particulièrement engagée ...

 

Les "Roques de Gracia"

 

 

 

 

Au rappel

 

Début de la deuxième longueur

 

Fin de journée sur le Teide

 

Couches de cendres et de laves

 

De fil en aiguilles, voilà près de deux semaines que nous sommes à Ténérife. Nous sympathisons avec Txiki, un marinero de San Miguel qui parle français, et Agnès et Pascal, un couple de français qui part s’installer aux Etats-Unis. Par nos amis Sophie et Veit, qui carènent Moemoea au Puerto de las Nieves à Agaete, nous entendons parler de l’association « Correos de la Mar » (http://www.correosdelamar.org/), basée sur l’île de Gran Canaria, qui cherche des voiliers pour apporter des colis humanitaires au Cap Vert. Nous entrons en contact avec Martha, qui s’occupe de l’association à Las Palmas. Oui, ça les intéresse que nous emportions des colis, et Ico, qui s’occupe de la partie sud de l’île, pourrait nous les apporter à Puerto Mogan. Marché conclu ! Reste à trouver de la place à Puerto Mogan … Et ce n’est pas gagné, car la marina est déjà bien garnie d’ordinaire, mais là elle est complète avec le mauvais temps, un gros coup de sud, annoncé pour le dernier week-end de novembre. Nous restons donc au chaud à San Miguel. Une petite virée à Santa Cruz pour visiter la ville. Et juste avant la tempête, nous partons à la découverte de la pointe nord-est de Ténérife. C’est le côté au vent, et les reliefs de la Monte de las Mercedes n’ont rien à voir avec les pentes sèches de la côte sud : la végétation est bien plus riche, bien plus verte, des merles chantent dans les villages perchés dans la montagne.

 

Dans les rues de Santa Cruz

 

Lundi 29 novembre, le coup de sud annoncé est bien au rendez-vous. Les îles Canaries sont en alerte rouge pour la pluie et le vent. Martha nous dit que les écoles sont fermées. Je reste au bateau pendant que les deux Philippe partent faire quelques courses avec Agnès et Pascal. C’est là que passe le plus gros du vent et de la pluie, des rafales de plus de 60 nœuds enregistrées par notre anémomètre qui est du genre paresseux. D’autres bateaux parleront de rafales à plus de 60 nœuds, voire 70 nœuds. Ca ne dure pas longtemps, mais assez pour faire exploser quelques biminis de bateaux cul au vent. Je regarde ça bien calfeutrée à l’intérieur du bateau, roulé par les rafales, fouetté par la pluie d’orage et les vagues écrêtées par le vent. Tout est blanc autour, on n’y voit pas à 3 mètres. Les autres compères subiront l’assaut des éléments dans un magasin de bricolage, entre des cataractes d’eau de pluie tombant dans les rayons. Le ciel a fini de s’essorer, les routes sont des torrents, les bureaux de la marina une piscine, que d’eau !

Le lendemain, un petit footing le long de la côte, et les nuages découvrent le Teide coiffé d’un blanc bonnet de neige toute fraîche de la veille. Agnès et Pascal, et un autre bateau de français appareillent pour les Antilles, en faisant d’abord route plein sud pour se mettre au plus vite hors de la portée de la dépression suivante. C’est un créneau météo étroit, que nous ne prenons pas car nous avons rendez-vous avec « Correos de la Mar » à Gran Canaria. En espérant en avoir un autre peu de temps après … mais … patience ! Ce sera conté dans un prochain article !

 

Mercredi 1er décembre, Txiki vient nous saluer en prenant le café à bord. Nous partons en direction de Puerto Mogan, une des marinas les plus prisées de Gran Canaria et même de toutes les Canaries, dixit le guide nautique. Le Teide enneigé émerge des nuages pour un clin d’œil avant de retourner dans ses brumes …

 


21/12/2010
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Gran Canaria : patience et dépressions

Gran Canaria : patience et dépressions

 

 

Bientôt sur vos écrans !.................


21/12/2010
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