Flores, île fleurie

Flores, île fleurie

 

Dimanche 1er juillet 2012 : nous sommes arrivés au petit matin devant Lajes das Flores. Petit-déjeuner au calme, puis nos voisins les Harpo émergent, et nous discutons avec Gérard et Fanou. Ils sont arrivés depuis une dizaine de jours. Pour la place à la marina ? Il faut entrer, s’installer sur une place, ou à couple d’un autre bateau s’il n’y en a pas, et demander ensuite au responsable du port. La marina de Lajes das Flores est vraiment petite, ouverte depuis l’année dernière seulement, un seul ponton flottant pour des voiliers, quelques places le long des quais, et le reste est réservé aux bateaux de pêche. Une place se libère, à côté de François, un Breton. Sahaya bien amarré, ça y est, nous pouvons enfin nous considérer comme définitivement arrivés !

 

 

 

Flores est l’île la plus occidentale de l’archipel des Açores, qui comporte 9 îles réparties en 3 groupes : le groupe occidental avec Flores et Corvo, le groupe central avec Terceira, Graciosa, São Jorge, Pico et Faial, et le groupe oriental avec São Miguel et Santa Maria. Ces îles d’origine volcanique ne sont pas très grandes, 6 km x 4 km pour Corvo la plus petite, 18 km x 12 km pour Flores, São Miguel est la plus grande avec 745 km2. A l’échelle de l’Atlantique, ce sont de petits confettis semés dans l’eau sur plus de 600 km de long, et qui pourtant étaient connus depuis longtemps : en 1154, neuf îles au large des Canaries sont mentionnées par un explorateur et géographe arabe à la cour du roi de Sicile Roger II, et en 1351, elles apparaissent sur une carte génoise. L’histoire de leur découverte par les Portugais est incertaine, à quelques années près, la primeur revenant selon les sources soit à Diogo da Silves, en 1427, soit à Gonçalvo Velho Cabral, mandaté par le Prince Henri le Navigateur, qui aurait abordé Santa Maria en 1432. Quoiqu’il en soit, quand les marins portugais débarquent aux Açores au XVème siècle, il semble bien qu’il n’y ait pas de trace de présence humaine avant eux. Henri le Navigateur envoie des colons à partir de 1439. Flores et Corvo, les deux îles les plus à l’ouest, ont été officiellement découvertes plus de dix ans plus tard, en 1452.

L’origine du nom Açores suscite également diverses théories, la plus connue associant ce nom aux nombreux milans existant sur l’archipel, et qui ont été confondus avec l’autour, un autre oiseau rapace, qui se dit « açor » en portugais.

Une fois connues, les Açores deviennent un pivot stratégique au milieu de l’Atlantique : escale pour les navires de retour de pillage des Indes occidentales, théâtre des batailles navales entre les Espagnols et les Anglais pendant la domination espagnole du Portugal (1580-1640), base alliée pendant la Seconde Guerre mondiale. Pour les plaisanciers que nous sommes, elles sont sur la route de retour vers le vieux continent, alors ce serait vraiment dommage de se priver de cette escale ! Baignées par le Gulf Stream, les îles des Açores profitent d’un climat plutôt agréable, avec des étés chauds mais sans trop, et des hivers doux bien qu’arrosés.

 

 

Mais revenons à notre découverte de Flores. Le village de Lajes est perché au-dessus de son port de pêche, et il faut grimper raide par des ruelles pavées qui longent des jardins, et qui portent des noms évocateurs de l’attachement à l’océan : rue des pêcheurs, rue des baleiniers, etc.

 

L'église de Lajes das Flores

 

Notre premiers pas sont pour la Faja de Lopo Vaz, tout près de Lajes. Premier aperçu des Açores, où nous retrouvons le style portugais déjà rencontré il y a deux ans à Madère et au Cap Vert, avec de petites routes pavées, bordées de murs de pierres sèches. Les murs sont souvent remplacés ou doublés par des haies d’hortensias. Les prés verts sont délimités par ces haies bleues, et des vaches en robe beige y broutent tranquillement. C’est la campagne, c’est paisible ici. Continuons vers la « faja », qui est une zone plane, en bord de mer, créée par l’éboulement des rochers depuis les falaises. Comme on le verra ensuite dans les autres îles des Açores, les « fajas » sont le plus souvent habitées, même si elles ne sont parfois accessibles que par de petits sentiers muletiers taillés en zigzag dans la falaise. Ce sont des zones planes et fertiles, avec des cultures en terrasse et de petites maisons, alimentées par des sources ou des cascades. Tout ce qu’il faut pour s’installer donc. Celle de Lopo Vaz ne fait pas exception, un sentier étroit descend raide en offrant de belles vues sur la mer.

 

Vers la Faja do Lopo Vaz

 

Encore des plastiques ?? Non, les flotteurs de petites méduses échouées

 

 


 

« On se croirait presque à la Réunion », me dit Philippe qui connaît son sujet. Au fil de nos balades à pied et en VTT sur l’île de Flores, une autre ressemblance avec son île volcanique de l’océan Indien va vite lui sauter aux yeux : l’importance des espèces végétales exogènes envahissantes : pittosporum, hortensia, et surtout, le Hedychium gardneranum Sheppard ex Ker Gawler, appelé ici

Roca-da-Velha ou Conteira, qui semble de loin le plus entreprenant et le plus coriace. C’est une plante de la famille du gingembre, qui fait de grandes hampes florales jaunes, plutôt jolies ma foi, et au parfum sucré, mais alors, elles garnissent l’espace de façon éhontée ! Les pentes, les talus, les sous-bois, ne sont souvent qu’une marée jaune et verte, laissant peu de place aux plantes endémiques. Et elles semblent particulièrement pleines de vigueur, avec des racines costaudes qui s’immiscent entre les pierres, font éclater les murs. Des envahisseurs … Le Cryptomeria Japonica est planté de façon très exclusive et semble peupler aussi exclusivement les rares forêts ou bois de l’ile. A l’origine, il aurait été implanté pour fixer les terrains soumis à l’érosion suite à la déforestation massive, mais continuerait toujours à être planté au détriment d’autres arbres. Où sont donc les plantes et les arbres endémiques ou du moins existants sur les îles avant l’arrivée de l’homme ?

Côté peuplement animal, les Açores connaissent aussi des déséquilibres, comme beaucoup d’îles. Sur Flores, les lapins pullulent, c’est incroyable le nombre de pompons blancs qui traversent les routes et les chemins. Les rats sont aussi un problème, et on retrouve, semés sur les chemins, pleins de sachets plastiques avec du poison.

 

Roca-da-Velha : l'envahisseur au parfum sucré

 

Et les plaisanciers alors, constituent-ils une espèce invasive aux Açores ?? A Flores, pas encore. Et heureusement, car la marina est petite ! Mais néanmoins, les bateaux tournent beaucoup, s’arrêtant en général quelques jours, voire moins. Le plus gros de la troupe des voiliers qui traversent l’Atlantique en direction de l’Europe arrive plutôt à Horta, la grande marina de l’île de Faial, plus à l’est. Ils arrivent des Antilles, des Etats-Unis, du Canada, et vont vers la France, l’Angleterre, la Hollande, ou bien ils piqueront vers Madère, parce qu’ils font ou refont un tour de l’Atlantique.

 

Quelques jours après notre arrivée, nous avons envoyé un mail à Herb Hildenberg, le Canadien qui fait le routage météo par radio, pour le prévenir que nous étions à bon port :

 

5 juillet 2012, de Sahaya à Herb :

« Hello Herb,

We arrived in Flores last Sunday. Our SSB antenna is not very good so we did not try to emit, nevertheless we could hear the weather forecast you provided to our “neighbours” Sans Souci, and Silver Queen. Thanks a lot for this.

Best regards

Nathalie and Philippe »

 

Et la réponse de Herb, le lendemain :

“Hi Nathalie and Philippe

Thank you for your note. Good to know that you could copy the conversations with other boats.

Take care and

Have a good watch

Herb

 

Fixed HF Marine Land Station VAX498

http://www3.sympatico.ca/hehilgen/vax498.htm

 

 

Sur le bon chemin

 

Une rencontre

 

Sur le chemin vers Faja Grande, le "Saint-Tropez" de Flores !

 

Il n’y a qu’un ponton à la marina de Lajes, c’est donc facile de nouer des contacts avec les nouveaux arrivants. Chacun raconte sa version de la transat’. Celle de Jean-Luc et Caroline, sur Khaya, partis des Bermudes en même temps que nous et arrivés quelques jours après, ressemble beaucoup à la nôtre : pas franchement agréable, mais n’ayant pas eu l’information sur la menace de Chris, ils ont fait un peu plus de « tout droit » et eu du vent un peu plus fort, avant de se faire encalminer plusieurs jours dans l’anticyclone des Açores, en ne mettant le moteur que sur la fin, par manque de gasoil. Après, nous avons la version de Yves le Québécois, sur Rusée-de-Jersey, le premier navigateur hauturier avec lequel nous avions sympathisé il y a deux ans à Porto Santo, et que nous avons eu la surprise de retrouver ici : transat’ « de demoiselle », traversée rapide avec du bon vent portant, et une belle mer, et du beau temps. Yves est parti des Bermudes à peine une semaine après nous, et les conditions « normales » s’étaient remises en place. Il aurait donc mieux fallu attendre quelques jours.

Et une autre version encore, celle de Pekka le Finlandais, sur Sarema, qui était notre voisin de carénage à Cariacou l’année dernière. Lui venait des Antilles et a traversé presque entièrement au moteur, louvoyant pour essayer de trouver de petits souffles d’air, avec l’angoisse de ne pas avoir assez de gasoil. Et il a rencontré un voilier, en dérive dans l’anticyclone depuis 10 jours, qui lui demandait du gasoil !

 

 

 

 

Une île à la bonne taille pour la visite en vélo

 

Sur l’unique ponton flottant de Lajes, parfois presque entièrement francophone, avec une majorité de Français et de Québécois, l’ambiance est bien sympathique. Il y a des soirées barbecue à la plage, des soirées guitare. Conformément à la coutume, les navigateurs sont encouragés à faire un dessin sur les murs autour de la marina, pour laisser une trace de leur passage. Alors Philippe sort ses pinceaux et peint un petit carré pour un Sahaya d’inspiration tibétaine. Et puis il y a aussi le plaisir des fromages retrouvés, et le « pao de milho » (un pain à base de farine de maïs, mélangée ou non avec de la farine de blé), et les vins du Portugal, et des balades jusqu’à des lacs nichés au creux de caldeira, perles d’eau sombre dans des écrins de pierre ou de mousse. Ajoutez aussi des cascades, et des phares, et des fajas, et des hortensias, envahissants mais bien jolis quand même, et avec tout ça, le temps passe vite, et il faut bien songer à changer d’île …

 

Soirée "gratte" bien animée sur Sahaya

 

Travaux en cours


Et voici l'oeuvre !

 

 

Ce n'est pas l'eau qui manque

 

 



26/08/2012
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